Le tiers exclu
Ou comment la société, la française en particulier, institue un développement séparé parvenant à être revendiqué par ceux-là mêmes qui sont exclus.
Le projet d’hébergement obligatoire des sans-abri que nourrissait Christine Boutin est symptomatique de l’étonnement de beaucoup à voir ces associations s’essuyer le refus de nombre de SDF à les suivre dans les structures d’accueil, d’hébergement et d’assistance. En bonne rousseauiste, la France considère qu’il faut « forcer les hommes à être libres » et prendre les décisions pour le bien supposé des populations en danger à la place de celles-ci, quand bien même elles y seraient fermement opposées.
Le mendiant absolu, celui qui n’a plus rien et dort dans la rue, a une fonction sociale. Il cache la vraie misère. En focalisant sur lui toute l’attention de la société, il parvient à faire oublier la paupérisation générale de celle-ci. Il cristallise la pauvreté et mobilise tous les efforts de la charité en persuadant qu’il est l’unique malaise de la société, pendant que les conditions générales de la population se dégradent.
Le tiers exclu (IV): prolégomènes à une critique de la raison socio-politique
Société 2 commentaires »Luccio se désespère que son dernier texte sur l’euthanasie ne suscite pas les réactions qu’un tel sujet, et surtout une telle réflexion, mériterait. Il propose en effet quelque chose de neuf, qui – je cite son commentaire – « interroge les conditions de possibilité d’un débat, avançant que celles qu’on suppose acquises risquent de varier », déduisant ce qui pourrait advenir d’une procédure d’euthanasie institutionnalisée en prenant la méthode du catastrophisme éclairé, et constatant que l’égoïsme envisagé comme principe moral conduirait contre toute attente à se prononcer contre. Mais cette nouveauté dans l’argument laisse le public froid, ce même public qui fut plus disert sur une réflexion condescendante sur l’antisionisme, ou sur une autre parodique.
De plus en plus apparaissent dans les grandes villes des dispositifs très subtils destinés à prohiber aux SDF l’accès à certains lieux. Le fil barbelé interdit aux vaches d’aller plus loin, les filets posés sur les monuments défend au pigeons de les salir, de même que ces longs pics posés aux alentours des toits. À qui est imperméable au droit, à qui ne comprend pas les « no loitering, no trespassing », on agit avec des moyens physiques, matériels qui interdisent non plus juridiquement une chose, mais mécaniquement. Lire la suite »